French kick !

D'où viennent les clichés sur les français dans les films américains ?

Dossier | Par Arnaud Desfontaines | Le 27 mars 2014 à 12h49

Les sorties récentes de Monuments Men et Captain America : le soldat de l'hiver sont des illustrations frappantes d'un péché mignon mais récurrent dans les films hollywoodiens : les clichés sur les français. Tentons de comprendre comment le cinéma américain a façonné au fil des années l'image des français à l'international...

On ne le sait que trop bien. Les Français souffrent de nombreux clichés aux États-Unis et plus généralement dans le monde. Il est donc assez naturel que le cinéma américain reflète allègrement ces stéréotypes.

Qu'ils sont beaux, Jean Dujardin et ses compatriotes avec leur béret, clope au bec lançant des "merci" et des "bonjour". Ces mots sont apparemment les seuls dont les sonorités sont audibles par le public américain tant les dialogues en français, essentiellement entre Matt Damon et Cate Blanchett, sont incompréhensibles pour des francophones. Le film s'en moque un peu, amenant d'ailleurs à une scène hilarante. Au delà de ça, Cate Blanchett va au travail en vélo, affiche clairement son "ouverture d'esprit" au bel américain fringuant, lui faisant paradoxalement la leçon sur sa tenue vestimentaire. "It's Paris !"

Captain America se veut peut-être un peu moins virulent. On y trouve quand même des terroristes français arborant fièrement leur fanion et parlant eux-aussi avec un accent québécois étonnant. On oublie pas non plus le béret mais rien que l'idée de terroristes français fait tiquer. «C'est ainsi dans le comic original.» argumente Joe Russo, l'un des deux frères réalisateurs du film. Pour le coup, il a raison. Au final et comparé à Monuments Men, Captain America : le soldat de l'hiver s'en sort bien. Mais d'autres cultures n'ont pas cette chance, comme le montre l'une des scènes post-générique qu'on se gardera bien de vous dévoiler.

Si l'apparente inaccessibilité de notre langue est souvent évoquée ou imagée, ce n'est pas le cliché qui pourrait énerver le plus. De nombreux films, de Matrix Reloaded à Monuments Men, décrivent les Françaises comme ayant des moeurs légères et les Français comme des romantiques infidèles notoires. Il semblerait aussi que la plupart de nos plages soient autorisées aux nudistes. Il paraîtrait même que les Françaises ne s'épilent pas les aisselles. Nous n'avons apparemment aucune gêne, cela va de soi. Nous sommes définitivement un peuple volage libre de toute tenue. Dans les deux sens du terme.

Alors que dire de notre spécialité culinaire résultant de la fermentation du lait de vache ? Vous savez, cet animal exotique parfois tacheté que l'on peut admirer dans les livres pour enfants. Car là où les Américains sont habitués au Philly, le bleu et le camembert sont des dangers biologiques majeurs aux States. Si bien qu'aucun réalisateur n'osera provoquer les institutions établies en arborant une telle menace pour la sécurité nationale. Par contre, le vin et la baguette sont des attributs qui nous définissent souvent dans les films tout comme notre amour inconditionnel des croissants et du café. Si bien qu'apparemment, pour nous, s'il n'est pas français, il est, par principe, infect.


T'appelles ça du café !, extrait de Godzilla

Monuments Men insiste particulièrement sur un autre a priori que nous avions alors en commun dans les années 40 : la cigarette. Car oui, nous sommes aussi un peuple de fumeurs. « L'équipe de The Artist étaient devant moi et maintenant je sens la cigarette et l'arrogance. » Ces mots, nous les devons à Kaui Hart Hemmings, auteure américaine, à la suite de la cérémonie des Oscars 2012.

On en oublierait presque les clichés sur nos goûts vestimentaires, essentiellement composés du béret et de la marinière. Mais nous sommes aussi à la pointe de la mode. Toute invitation à dîner nécessite de s'habiller en Chanel ou Jean-Paul Gaultier.

Ces clichés, on les connaît tous et la liste est longue. Mais d'où viennent-ils ? Dans Casablanca, les Français sont décrits comme des patriotes, résistant tant bien que mal à l'oppression. L'esprit de révolte, associé à la Révolution Française et aux droits de l'Homme est également bien présent dans l'imaginaire collectif mais il n'a plus grand chose de français dans un film comme Les Misérables. C'est probablement avec le débarquement et les nombreux témoignages des soldats américains que les États-Unis et la Grande Bretagne ont pu se forger une image de la France malheureusement peu reluisante.

La Nouvelle Vague du cinéma français a sans doute aussi participé à l'installation de clichés. Même si beaucoup de cinéastes américains dont Joe et Anthony Russo, revendiquent l'importance de Godard ou Truffaut dans leur parcours, l'abstraction du cinéma post-68 a probablement contribué à installer l'image d'un certain snobisme français dans l'esprit du public américain.

Enfin, reconnaissons que le cinéma français est extrêmement sexualisé. La censure est en effet beaucoup plus légère en ce qui concerne la nudité dans notre pays. En même temps qu'il révélait l'actrice Eva Green au public international, un film comme Innocents a ainsi pu renforcer l'image des françaises libres et pas nécessairement imberbes dont nous parlions plus haut.

Si faute il y a réellement, nous avons donc notre part de responsabilité, d'autant que les plus grosses collections de clichés se trouvent parfois dans des films « bien de chez nous » comme Amélie Poulain, Les Choristes ou plus récemment Malavita de Luc Besson. Il y a bien évidemment un manque de bonne foi, lorsque l'on nous estime encore identique à nos grands-parents. La France a évolué. Presque plus personne ne porte de béret et la cigarette s'est vu interdite des lieux publics il y a maintenant huit ans. Mais notre cas n'est pas exceptionnel. Les Japonais et les Allemands ne sont pas beaucoup mieux lotis que nous, coincés respectivement entre le cliché du samouraï kamikaze de Pearl Harbor et du nazi blond aux yeux bleus. De même, les ressortissants du Moyen Orient et les Musulmans en général sont bien souvent assimilés basiquement à des terroristes. On ferait donc mieux de ne pas trop se plaindre... Il parait en plus que c'est notre spécialité !

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18 commentaires
  • fandamen
    commentaire modéré @musashi1970 Ah ok :) je comprends mieux ton point de vue maintenant ! et je suis totalement d'accord ! :)
    3 avril 2014 Voir la discussion...
  • DOP
    commentaire modéré C'est très bien d'aimer le fromage la baguette et la cigarette. Gardons ça.
    3 avril 2014 Voir la discussion...
  • Bully
    commentaire modéré "En même temps qu'il révélait l'actrice Eva Green au public international, un film comme Innocents a ainsi pu renforcer l'image des françaises libres et pas nécessairement imberbes dont nous parlions plus haut."

    L'histoire du film Innocents se déroule en 1968, donc logique, qu'Eva Green ne soit pas imberbe ! Enfin bon, je dis ça, je dis rien ;)
    3 avril 2014 Voir la discussion...
  • Arch_Stanton
    commentaire modéré @arnauddesfontai Tu as un putain de correcteur derrière toi pour publier ton article !
    Parce que ton commentaire est écrit à la truelle ...
    C'est dommage, ça gâche un peu !
    Bref.

    Quant au contenu de ton article, pas un mot de Charles Boyer ou Maurice Chevalier (les précurseurs, stars absolues).
    Aucune mention des excellents mais caricaturaux Jacques Marin (http://www.vodkaster...sur-le-toit-du-monde), Moustache (http://www.vodkaster...n-million-de-dollars) ou même Marcel Dalio qui ont beaucoup fait pour ancrer l'image du Français moyen dans l'inconscient collectif US en tant que seconds couteaux de talent à la gouaille toute gauloise.
    Dommage, ces cinq exemples simples mais flagrants auraient pu apporter un peu d'eau au moulin de ton article et l'étayer davantage à mon avis.
    Cordialement.
    3 avril 2014 Voir la discussion...
  • RHugo
    commentaire modéré Une petite vidéo sympa qui regroupe certaines représentations des français dans les films américains.
    http://vimeo.com/82750579
    4 avril 2014 Voir la discussion...
  • musashi1970
    commentaire modéré @RHugo Pas mal. Je te la pique et je la met sur mon profil FB trop marrant ces clichés, thanks !
    ;-)
    4 avril 2014 Voir la discussion...
  • Josse
    commentaire modéré Dommage de ne pas avoir parler de toute une frange du cinéma américain qui stigmatise les français comme des traîtres (en réaction à la seconde gm il me semble). On le voit même dans le dernier Batman où Cotillard est évidement une méchante.
    8 avril 2014 Voir la discussion...
  • Ahura
    commentaire modéré @Torrebenn J’avoue je suis impardonnable pour ce coup-là, j’ai fait ce commentaire à la va-vite sans me relire. Cela dit, ça n’a pas de rapport avec mon article ou le fait d’avoir un correcteur.

    Les commentaires sont aussi faits pour enrichir le propos. Je suis personnellement très content que vous apportiez des informations supplémentaires.
    14 avril 2014 Voir la discussion...
  • Brazilover
    commentaire modéré Comme tu le dis très bien à la fin de l'article, nous ne sommes pas les seuls dans ce cas-là, à être caricaturés à l'extrême dans les films hollywoodiens, je pense que ça vient de la volonté manichéenne et patriotique du cinéma hollywoodien d'avoir recours à des clichés tels, faut dire que c'est facile d'avoir recours à des lieux communs pour désigner un peuple, un pays, et raconter une histoire. Mais c'est assez déplorable puisque ça donne une vision pas forcément bénéfique du peuple ou du pays en question, et ça prend le public américain pour des idiots, comme s'ils n'étaient pas capables de comprendre une autre culture.
    16 avril 2014 Voir la discussion...
  • Hobbit77
    commentaire modéré Si vous avez vu X Men Dark Phoenix, la scène finale a dû bien vous faire rigoler ;-)
    9 août 2019 Voir la discussion...
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