Phantoms of Nabua

Dans un paysage nocturne apparaissent les contours d’un écran de tissu, sur lequel est projeté un film. Lui aussi tourné la nuit, il montre un village sur lequel tombent sans discontinuer de violents éclairs. Un groupe d’adolescents joue avec un ballon de football enflammé. Source de lumière intermittente, la balle les éclaire alternativement et laisse dans l’herbe des traînées lumineuses. Elle enflamme l’écran, qui se consume lentement et la lampe du projecteur apparaît. Comme Haiku et Ghost Teen, Phantoms of Nabua fait partie de Primitive Project, tourné dans le Nord-Est de la Thaïlande. Le village de Nabua y a fait l’objet d’une violente répression militaire entre les années 1960 et les années 1980, conduisant une partie des habitants à se retrancher dans la forêt. Le nom du film évoque ces événements tragiques, mais l’idée de destruction, bien présente – des éclairs qui tombent, un tissu qui brûle – contraste avec l’attitude joyeuse des adolescents. Comme toujours chez Apichatpong Weerasethakul, la mémoire n’est pas uniforme et l’image se refuse à toute tentative de compréhension unique.