Le diktat de l'humour

The Dictator : Le retour à la pure fiction a t-il réussi à Sacha Baron Cohen ?

Dossier | Par Raphaele Heguy | Le 26 juin 2012 à 16h01

Avec The Dictator, réalisé par Larry Charles, Sacha Baron Cohen délaisse le faux documentaire pour revenir à la pure fiction. Même si la forme est différente, le fond est toujours le même : Sacha Baron Cohen se grime en journaliste kazak, en homosexuel ou en dictateur dans le but de provoquer, de faire rire et de dénoncer par l'outrance. Le tout est de savoir si la fiction sied aussi bien à ce type de contenus politisés et si, avec The Dictator, Sacha Baron Cohen n'a pas perdu de son mordant ?

Les faux documentaires...

Le fond de commerce de Sacha Baron Cohen est le politiquement incorrect. Pour arriver à ses fins, il utilise l'humour, mais pas n'importe quel humour, la moquerie. Avec lui pas de privilégié, toutes les religions et les nationalités sont visées (avec, malgré tout, une petite préférence pour les américains) par ses blagues graveleuses. Avec Borat et Bruno, filmés comme des faux documentaires le réalisateur aura partagé le public et les critiques qui auront malgré tout loué les ressorts comiques utilisés dans ses films. L'idée : placer ses personnages fictifs dans le monde réel en essayant de les mettre dans des positions inappropriées pour pousser les gens à bout et dénoncer les comportements. Pour cela, il ne se creuse pas vraiment la tête et met en place des situations pas vraiment recherchées (Borat veut serrer la main des américains, Borat veut faire des câlins aux passants, Borat se masturbe devant une affiche ou encore Borat fait ses besoins en pleine rue). Ni irrévérencieux, ni très drôle, ses gags tombent souvent à plat même si on peut admirer son impertinence et son originalité.


Borat en voiture, extrait de Borat, leçons culturelles sur l'Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan

Cette impertinence est justement la clé du succès de Cohen car même s'il ne me fait pas décrocher un sourire, (oui je fais partie de cette catégorie de la population qui n'a aucun sens de l'humour car elle n'aime pas Sacha Baron Cohen) ces films m'intriguent. Ils m'intriguent car ils me permettent de me confronter à des réactions assez inattendues. En effet, les acteurs de Borat n'étant pas des acteurs mais des « vrais » gens, leurs réactions face à l'irrévérence de Cohen peuvent être assez violentes. La curiosité me pousse également à aller voir les films de Sacha Baron Cohen car tel un membre de Jackass on ne sait jamais jusqu'où l'homme va pousser la provocation et quels nouveaux problèmes il va pouvoir se créer. Le souci, c'est qu'avec The Dictator, le britannique choisit de mettre de côté le seul intérêt de ses films, à savoir le plaisir de voir réagir les gens et de s'imaginer être confronté aux mêmes situations. En choisissant de faire de son nouveau film une fiction, le réalisateur perd son impertinence au profit d'un scénario plutôt mauvais.

... font place à la fiction

Les succès de Borat et de Bruno tenaient surtout à l'originalité de Sacha Baron Cohen. Une fois l'effet de nouveauté révolu, le réalisateur a décidé de changer de registre. Le film, ni bon ni mauvais, est tout simplement inutile. Alors oui, les fans de Sacha Baron Cohen retrouveront le même humour que dans ses précédents films, ce qui devrait les contenter mais le scénario est d'une banalité affligeante. Parmi les gags éculés de The Dictator, mention spéciale à la scène de l'accouchement pendant lequel Cohen et Faris se tiennent la main à l'intérieur du vagin de la femme enceinte (?). Le scénario est en fait le plus gros problème du film, il oblige Sacha Baron Cohen à suivre une ligne directrice et ne laisse plus aucune place à l'improvisation. Le film n'est qu'une succession de gags n'ayant aucun lien les uns avec les autres autour desquels Cohen a tenté de bâtir un scénario un tant soit peu crédible mais qui n'est finalement là que pour mettre en avant l'humour du britannique. Mais la fiction ne peut être considérée comme seule coupable, il aurait été également important de mettre en avant un peu plus d'idées originales.

A la recherche de la nouvelle blague

Avant de devenir une comédie inintéressante, The Dictator avait un pitch assez alléchant : Un dictateur, en visite à New-York et trahi par son bras droit, se retrouve à errer dans Manhattan dans le but de retrouver son statut de leader suprême alors qu'un sosie a été engagé pour le remplacer. Jusque là tout semble adapté pour faire de ce nouveau film un succès dans la veine de Borat, mais à peine la projection entamée on se rend compte qu'on ne verra rien de nouveau dans ce film, à peine quelques gags réussis au milieu de 90 minutes d'ennui. Sacha Baron Cohen continue de se moquer des juifs, des arabes, des américains mais en laissant de côté cette fougue et ces provocations qui pimentaient ses films précédents. Finalement, c'est dans la promotion de son film que Cohen a su être le plus drôle (vidéo pour la victoire de François Hollande, festival de Cannes ou encore son arrivée aux oscars avec l'urne de Kim Jong-il) en mettant en avant cette irrévérence chère à ses personnages. Malheureusement celle-ci est noyée dans tics scénaristiques de The Dictator et laisse une forte impression de déjà vu...


News Report, extrait de The Dictator

Images : © Paramount Pictures France

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2 commentaires
  • MarcelPP
    commentaire modéré a-t-il réussi... SVP
    26 juin 2012 Voir la discussion...
  • FilmsdeLover
    commentaire modéré Les Américains aussi, dans le premier paragraphe. Le Britannique dans un autre. Les nationalités prennent une majuscule quand elles sont utilisées comme nom mais pas quand elles sont utilisées comme adjectif. Oui, c'est la journée du français.
    26 juin 2012 Voir la discussion...
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